Sierra Leone

Sommaire du chapitre : Sierra Leone

La région des gisements est limitée à l’est par les frontières guinéennes et libériennes et à l’ouest par la rivière Sewa. Au sud, elle se prolonge au-delà de Kenema. La zone diamantifère s’étend de Yengema, au nord, jusqu’à Kenema, au sud. On trouve aussi des champs alluvionnaires entre les monts Nimini et Gori et des dykes kimberlitiques dans la région de Tongo. Il est certain que beaucoup de diamants ont été drainés vers les côtes et emportés par l’océan Atlantique. Les cristaux sont plus grands et de meilleure qualité que ceux trouvés au Ghana. Par exemple, le plus gros diamant de qualité joaillerie trouvé en Sierra Leone a été découvert en 1972 et il pesait 970 carats.

Exploitation artisanale et alluvionnaire en Sierra Leone
Exploitation artisanale et alluvionnaire en Sierra Leone

Principales mines: Gori, Kenema, Nimini, Sewa, Yengema. Actuellement, la Sierra Leone doit faire face à de graves problèmes sociaux, qui pourraient influencer la production.

L’État vient de mettre sur pied le Precious Minerals Marketing Company (PM-MC), afin d’assurer le monopole national de la commercialisation des diamants. Au mois de mai 1992, 100 mineurs illégaux perdent la vie dans une mine clandestine, près de Nyeya, située à 300 kilomètres de la capitale Freetown. En 1993, en début d’année, l’organisme public « The Sierra Leone Government Gold and Diamond Office » (GGDO) fait paraître un rapport qui met en lumière que l’exportation durant les quatre premiers mois de l’année a rapporté plus de 10 millions de dollars. Ce sont surtout les régions de Koïdu, de Yengema et de Tongo qui se révèlent les plus riches en minerai.

Après quelques années de guerres civiles la paix est revenue au pays et les exportations de l’or et du diamant ont repris.

Une société joint-venture entre Canadiens et Sud-Africains (Koidu) exploite maintenant la région kimberlitique ; l’estimation du sous-sol est de 6,7 millions de carats.

Faux diamants trouvés en Sierra Leone avec document Kimberley
Faux diamants trouvés en Sierra Leone avec document Kimberley

Sierra Leone après le désastre

Lorsque les Portugais découvrirent la région au xvie siècle, ils la baptisèrent Sierra Leone ou montagnes des lions. Pays d’Afrique occidentale, ouvert sur l’océan Atlantique, entouré au nord et à l’est par la Guinée Conakry au sud-est par le Libéria, le pays est petit à l’échelle africaine (un peu plus du double de la Belgique). Il devient colonie britannique en 1787. La capitale Freetown doit d’ailleurs son nom aux anciens esclaves venus des États-unis et des Antilles, lors de leur libération après l’abolition de l’esclavage. Le 27 avril 1961 le pays reçoit son indépendance ; s’ensuivront des périodes d’accalmies suivis de coups d’états.

La population compte plus de 6 millions d’habitants de 20 différents groupes ethniques, dont 60 % de Musulmans, 10 % de Chrétiens et 40 % de croyance indigène. On y parle 3 langues locales et surtout l’anglais. Les ressources naturelles sont la bauxite, le fer, le titane et surtout l’or et le diamant. La deuxième ville du pays est Bo et la troisième, Kenema, est le centre des transactions de diamants. La Sierra Leone était un paradis pour les touristes mais bascula malheureusement en 1991 dans une sanglante guerre civile entre les groupes ethniques.

Le pays retrouva la paix en 2002, mais cette instabilité était aussi, comme pour l’Angola, une des raisons de l’instauration du processus Kimberley en 2003. Le système oblige toutes les transactions de diamants de se baser sur un certificat prouvant l’origine non criminelle du diamant.

Le système, déjà instauré à Anvers avant la ratification des Nations Unies, obligeait les diamantaires anversois de fournir lors d’importation de diamants bruts, le certificat d’origine émanant d’un gouvernement officiel, au risque de voir les marchandises confisquées. Grâce au certificat Kimberley, les ventes illicites, de contrebandes ou de blanchiment ont pratiquement disparu.

À la fin des hostilités, le pays était détruit, quasiment sans infrastructures, avec une population sans ressources. Heureusement l’or et surtout le diamant ont offert au pays des possibilités de reconstruction. Les investisseurs étrangers reviennent, tandis que la Communauté Européenne, la Banque Mondiale, les gouvernements anglais et américains aident au redressement. Le gouvernement a réformé la structure économique, facilitant le négoce du diamant brut ainsi que la création de tailleries pour avoir une valeur ajoutée.

Parmi les investisseurs étrangers, le groupe Steinmetz, qui exploite une pipe kimberlitique, est arrivé en 2004 à une production de 15 millions de dollars avec une valeur moyenne de 182 $ le carat. D’autres sont aussi actifs tels que la firme Magna Egoli et Milestone Trading Ltd.

La production est estimée à 318000 carats de gemmes et 374000 carats d’industriel d’après les chiffres d’US Geological Survey. La qualité de la production est de 13 % de pierres gemmes de plus de 2 carats, 22 % de pierres gemmes plus petites, 35 % de pierres de « type hindou », donc du diamant pour la taille de mauvaise qualité et 30 % d’industriel.

Environ 300000 à 400000 mineurs travaillent dans ce secteur artisanal et alluvionnaire, plusieurs se sont groupés en coopératives afin d’être plus rentables. Ces mineurs travaillent souvent à des salaires extrêmement bas ou même sans salaire, et espèrent trouver la pierre qui pourra changer leur existence. Car le pays produit de belles pierres, parfois de plusieurs carats. L’exploitation illicite a toujours été le talon d’Achille du pays, tout comme dans les autres pays d’exploitation alluvionnaire. Ce sont principalement les chefs locaux qui contrôlent la production. L’exploitation, souvent hasardeuse, attire malheureusement aussi les agriculteurs cherchant fortune, ce qui affaiblit l’économie et l’infrastructure sociale du pays. Le négoce est, quant à lui, principalement contrôlé par des négociants libanais. Il faut ajouter à ce tableau le problème de la corruption, qui reste une plaie pour les principaux pays africains. Le gouvernement est face à un dilemme, il pourrait participer dans certaines exploitations avec des investisseurs étrangers et ainsi avoir des revenus juteux, comme c’est le cas dans d’autres pays africains, malheureusement dans ce cas, la Banque Mondiale retirerait le financement de 50 millions de dollars pour la réforme du secteur.

Les licences d’exploitations artisanales sont exclusivement réservées aux Sierra-Léonais, tandis que l’exploitation industrielle est permise à des investisseurs étrangers, à condition d’avoir un partenaire local. Le partenaire local est souvent une personne hautement placée pouvant aider administrativement. Certains producteurs investissent non seulement dans du matériel d’exploitation moderne, mais aussi dans des infrastructures sociales, comme des écoles, des groupes électrogènes pour l’électricité et l’air conditionné, ou des dispensaires, cliniques et logements. Le but est l’exploitation du diamant brut, la taille du diamant et finalement la bijouterie, un programme ambitieux soutenu par des O.N.G. Le salaire des mineurs est devenu plus décent ; il varie de 3 $ à 20 $ par jour, ce qui est peu, mais malgré tout plus important que celui d’un officier de police qui doit se contenter de 1 $ ou de l’instituteur avec 0,65 $.

Si la guerre civile était principalement ethnique, c’était aussi une guerre tribale, dans laquelle les jeunes sans ressource pouvaient « se défouler ». Ces mêmes jeunes trouvent actuellement de l’emploi dans les mines de diamants et sont ainsi réintégrés dans une société qui retrouve de l’espoir. On retrouve même d’anciens ennemis côte à côte dans la mine, ayant le même espoir de trouver fortune. La présence des troupes des Nations Unies a aussi un impact positif sur la population sécurisée et ainsi sur l’économie.

Avant la guerre civile, il y avait une présence de la De Beers et de plusieurs acheteurs à Kenema ; depuis les hostilités, les Libanais ont formé un véritable cartel pour dissuader les nouveaux acheteurs. La manipulation des prix ne donne aucune chance aux nouveaux bureaux d’achats voulant s’établir à Freetown, Kono ou Kenema. Pourtant certaines firmes investissent dans des projets à petite échelle aidant les mineurs avec leurs licences et matériels d’exploitation et ils reçoivent en retour l’exclusivité de la production. Car les frais d’exploitation sont trop élevés pour les mineurs indépendants :

Licence200 $
L’utilisation d’un bulldozer pour 8 heures500 $
Salaires5 000 $
Pompes et Jigs8 000 $
Divers1 000 $

Soit un total de près de 15000 $ qu’il faut récupérer sur la production. Cette situation entraîne le recours à l’exploitation illicite, bien que l’exportation de diamant en fraude devienne de plus en plus difficile suite à l’instauration du document Kimberley.

Le diamantaire n’ose plus importer du diamant brut sans le fameux document. Il risque la saisie des marchandises, l’exclusion des bourses et la clôture de son compte en banque.

Pour les négociants en Sierra Leone, les licences sont différentes :

Exportateur étranger 30 000 $ 
Exportateur local5 000 $ 
Négociant étranger3 000 $
Négociant local1 000 $

Le pays souffre en plus du problème bancaire : alors que les transactions sont faites en cash et si possible en dollars, les banques ont un manque de liquidité.

Le pays s’organise lentement, le gouvernement doit rattraper plusieurs années de désastres, reconstruire son infrastructure et l’éducation nationale. Un point positif est que le pays connaît le taux le plus bas de sida de toute l’Afrique.

Grâce au diamant et une bonne gestion, le pays se relèvera et suivra, espérons-le, l’exemple du Botswana.

© Dureté 10 – Eddy Vleeschdrager