Principe et Rappel Historique

Sommaire du chapitre : Principe et Rappel Historique

Après avoir été clivé, scié ou débruté, le diamant est prêt à être taillé. Tailler un diamant signifie qu’on va réaliser sur une pierre brute un nombre défini de surfaces planes, appelées facettes, ayant une forme spécifique et présentant, l’une par rapport à l’autre, un degré d’inclinaison rigoureusement déterminé. Ce résultat s’obtient grâce à la pince du tailleur en diamant dont la tête, ou dop, dont elle est munie, peut prendre différentes positions, comme nous le verrons.

C’est en l’utilisant à bon escient que le spécialiste peut donner à la pierre brute la forme et l’éclat dont on veut la parer. Il sera ainsi possible de tailler différentes formes dont les plus courantes sont le brillant, la marquise, l’émeraude, la poire ou pendeloque, l’ovale, la baguette, la rose, le carré, la taille princesse et Flanders et pour les plus petites pierres, le 8⁄8, le swiss-cut, etc. Actuelle- ment la taille princesse, Flanders cut, Radiant et Asher font parties des tailles classiques.

La taille fin du xixe siècle
La taille fin du XIXe siècle
Miniature d’une taillerie fin du xixe siècle avec un moteur original Edison, collection de l’auteur
Miniature d’une taillerie fin du xixe siècle avec un moteur original Edison, collection de l’auteur

La taille étant un procédé d’usure, d’arrachement de matière, on conçoit aisément que le diamant, du fait qu’il est le corps naturel le plus résistant à l’usure, ne puisse être usé que par lui-même. Il se taille et se polit suivant les trois directions correspondant aux plans perpendiculaires aux trois axes quaternaires.

Toutes les faces d’une pierre brute n’offrent pas la même résistance à l’usure, ce qui découle de la structure cristalline du diamant. En outre, chaque face présente des directions d’usure plus « dures » ou plus « tendres » ; ainsi, la face d’un cube peut avoir une direction « tendre » et trois autres directions un peu plus « dures ». Des accidents lors de la cristallisation sont susceptibles de modifier le sens des directions d’usure, confrontant alors le spécialiste à des situations difficiles où seule compte son expérience.

Dans le passé, on ne taillait que les faces extérieures d’une pierre ou, plus précisément, on aplanissait les faces, à l’aide d’une latte en bois enduite de poudre de diamant, telles qu’elles se présentent naturellement. C’est ce que faisaient autrefois les hindous et c’est aussi ce qui se pratiquait au Moyen Âge à l’aide d’une latte de bois enduite de poudre de diamant, jusqu’à l’invention de Louis de Berquem.

Le sertisseur

Le sertissage dans les dops en plomb est un des plus anciens métiers étroitement liés à la taille du diamant et qui actuellement a disparu à cause de l’apparition du « dop mécanique » dans les années 1950.

Différents stades de la taille : du débrutage au brillant
Différents stades de la taille : du débrutage au brillant
Le sertisseur
Le sertisseur

Dans l’atelier de taille, il était celui qui préparait le diamant pour le tailleur lors de l’emploi du dop en plomb, sorte de coquille en cuivre rempli d’un mélange de plomb et d’étain et ressemblant à un œuf à la coque dans son coquetier; la coquille est reliée avec une tige en cuivre mou ce qui permet au tailleur de pousser légèrement le dop vers la position idéale. C’est le principe de base de Louis de Berquem. Le sertisseur devait chauffer le dop et le remplir avec du plomb préchauffé sur un brûleur à gaz. Le dop était placé sur un socle en bois et avec une louche, il le remplissait avec le plomb coulant ; à l’aide d’une large brucelle il aplatissait les bords afin d’obtenir la forme d’un œuf au-dessus duquel il plaçait la pierre.

Le diamant était enfoncé laissant seulement une partie de la pierre visible pour le tailleur. Ainsi le sertisseur, connaissant parfaitement la technique de taille, donnait les directives au tailleur car il connaissait la position de la pierre dans le plomb (invisible pour le tailleur). À cette fin il indiquait à l’aide d’un code, des flèches, et autres signes, la position et l’orientation de la pierre et de la taille.

À l’aide des dops plats on taillait en croix et avec les dops hauts on terminait le brillantage. Les dops brûlants étaient refroidis dans de larges bassins en émail remplis d’eau froide.

Cette méthode prenait beaucoup de temps. À cela il faut ajouter le risque que lorsque la pierre chauffait lors de la taille, elle pouvait s’enfoncer dans la « soudure » risquant ainsi de tailler de fausses facettes.

La taille est restée relativement rudimentaire jusqu’au début des années 1900. À la suite des recherches faites alors sur la physique, l’optique et la réfraction de la lumière dans les gemmes, on découvrit les principes régissant la symétrie qui doit obligatoirement être respectée lors de la taille du diamant, à quelques variantes près cependant.

→ Tout savoir sur les différentes formes de taille du diamant

Désignation des différentes parties du brillant
Désignation des différentes parties du brillant
Différentes formes : 1 brillant,
2 marquise ou navette, 3 poire ou pendeloque, 4 ovale, 5 baguette,
6 émeraude, 7 carré, 8 triangle
Différentes formes : 1 brillant,
2 marquise ou navette, 3 poire ou pendeloque, 4 ovale, 5 baguette,
6 émeraude, 7 carré, 8 triangle
Représentation des différentes duretés sur la surface d’un diamant.
Au plus les flèches sont petites, au plus la taille est possible
Représentation des différentes duretés sur la surface d’un diamant.
Au plus les flèches sont petites, au plus la taille est possible

En 1919, Tolkowsky publia un traité qui indiquait les proportions idéales à donner par la taille à un diamant pour qu’il réfléchisse la lumière au maximum. Cette taille comprenait 57 facettes : la facette de table, 32 facettes entre la table et le rondiste et 24 facettes entre le rondiste et la colette, cette dernière n’étant plus facettée. On considère que cette taille est la base de la taille moderne.

Un peu plus tard, en 1925, Johnson et Roesch, en se basant seulement sur la lumière tombant verticalement sur la table d’un diamant, donnèrent les proportions d’une taille qui n’eut guère de succès car elle était moins lumineuse du fait qu’elle ne tenait pas compte des rayons lumineux tombant en oblique. Cette taille fut appelée « brillant idéal ».

Direction de taille selon la dureté

  • 10 sur l’échelle de Mohs ;
  • Selon Brendler 4620460 x plus dur que le talc ;
  • Selon Rosiwal 140000 fois plus dur que le rubis ou le saphir
  • En 1939, Eppler découvrit la taille « fine pratique » qui se rapproche de celle de Tolkowsky
  • La taille « Parker », du nom de son créateur, se fit connaître en 1951. Elle présente la particularité d’avoir une très grande table étalée, ce qui donne l’impression que la pierre est plus grande, mais elle perd beaucoup en « vie » (éclat et brillance).
  • Les normes du « brillant standard Scandinave » furent établies en 1966 par Tillander en se basant sur une étude pratique des brillants. C’est cette nomenclature qui sert de base à la taille moderne. En 1978, l’I.D.C. ou International Diamond Council définit les normes qui donnent au diamant le maximum de réfraction.
  • Le succès du « Royal 144 » sorti en 1970 avec 144 facettes au lieu de 57, fut de courte durée et l’on constata même que plusieurs pierres revinrent dans les ateliers pour y être retaillées en 57 facettes normales dix années plus tard.

Proportions idéales d’un brillant selon
A – Tolkwsky (1919), B – Eppler (1939), C – Johnson et Roesch (1926), D – Standard scandinave
Proportions idéales d’un brillant selon
A – Tolkwsky (1919), B – Eppler (1939), C – Johnson et Roesch (1926), D – Standard scandinave
Taille parfaite du brillant selon les normes I.D.C 1978
Taille parfaite du brillant selon les normes I.D.C 1978
Précurseurs de la taille moderne
Précurseurs de la taille moderne
Une table de polissage
Une table de polissage

Régulièrement, on parle de tailles nouvelles comportant principalement un nombre impair de facettes, mais on peut estimer que le respect des proportions demeure. C’est le cas d’une taille toute récente, nommée « maximillian cut » comportant 78 facettes. Toutes ces tailles sont des variantes de la taille en brillant ou des formes de base.

Il n’est pas sans intérêt de mentionner le « dossier Elbe » qui frisait le roman de science-fiction. Le professeur Elbe, ingénieur de nationalité allemande, fut confronté un jour avec un problème de découpage au diamant. À son grand étonnement, il s’aperçut que le diamant, pris dans un certain sens, était bien moins dur qu’on le disait. Il se passionna tellement pour cette découverte qu’il consacra le reste de ses jours à l’étude du diamant. Ses investigations furent toutes théoriques au début, puis il passa à la pratique en installant chez lui un atelier complet.

Il en résulta un énorme dossier et plusieurs brevets. La taille du diamant devrait en être révolutionnée dans le futur car tous les principes de base admis jusqu’ici seraient à réexaminer. Ainsi, le professeur Elbe utilisa pour la taille un procédé qui n’a plus recours à la poudre de diamant. Il remplace le principe de la taille en 8⁄8, comme base du brillant, par une taille de facettes en nombre impair, etc. Le dossier du professeur Elbe, œuvre de toute une vie, fut acheté en 1980 à sa mort par le W.T.O.C.D., centre de recherche du Conseil Supérieur du Diamant (H.R.D.) à Anvers.

Comme dans beaucoup de professions, une certaine spécialisation s’est développée dans la taille du diamant et, actuellement, on distingue nombre de spécialistes :

  • Tailleurs de la mise en croix ;
  • Tailleurs en 8⁄8, parfois divisés en tailleurs de la couronne et tailleurs de la culasse ;
  • Tailleurs des pierres non sciées, spécialisés soit pour les 8⁄8, soit pour les brillants ;
  • Tailleurs des pierres fantaisie se spécialisant pour la taille en marquise, en poire, en baguette, etc. ;
  • Tailleurs des roses ;
  • Tailleurs pour l’industrie ;
  • Brillanteurs.

Table de polissage avec du savon dans le vieux dop en plomb
Table de polissage avec du savon dans le vieux dop en plomb

© Dureté 10 – Eddy Vleeschdrager