Inclusions des diamants

Sommaire : Inclusions des diamants

Les inclusions sont des accidents ou des déformations qui se sont produits pendant la formation du diamant au sein de la terre, lorsqu’il s’est trouvé en contact avec différentes matières ou quand il a rencontré des variations de température ou de pression, ce qui explique la diversité des pierres. Les recherches entreprises par Gubelin et Eppler (se basant sur des études de minéralogistes et géologues), entre autres, sur l’origine des inclusions, permettent de penser qu’elles ont pu se produire à différents stades de la formation du diamant :

  • Les inclusions antégénétiques sont celles qui existaient avant la formation du diamant;
  • Les inclusions syngénétiques se sont formées en même temps que lui;
  • Les inclusions épigénétiques se sont mises en place après sa formation.

En dehors de leur origine chronologique, on peut classer les inclusions en trois groupes :

Une inclusion de carbone dans un diamant
Une inclusion de carbone dans un diamant

Les glaces ou glets

Elles ressemblent à la fêlure du verre brisé et suivent, normalement, la direction des plans de clivage. Leur apparence est blanche et elles peuvent avoir la forme d’une plume ou celle d’une fleur. 

En dehors d’une origine géologique, les glaces peuvent aussi résulter d’accidents survenant lors du broyage de la kimberlite lors de l’extraction ou pendant la taille. On distingue différentes sortes de glaces:

  1. Les glaces fermées, à l’intérieur de la pierre ;
  2. Les glaces ouvertes, ayant un contact avec l’extérieur;
  3. Les doublés qui donnent une irisation dans les différents plans;
  4.  Les glaces en forme de cercle, souvent de provenance alluvionnaire, en forme de croissant;
  5. Les glaces provenant du sciage ou de la taille, dans le plan de clivage, faisant suite soit à une surchauffe, soit à un refroidissement brutal, soit à un coup sec, etc. ;
  6. Les glaces venant de l’éclatement d’un piqué donnant des déchirures dans toutes les directions, en forme d’aile de papillon ou d’hélice. Cette sorte de glace peut aussi se former pendant la genèse, lors d’une diminution de pression.

Les pierres, même taillées, présentant de telles fêlures ont peu de valeur car elles ont toujours des tensions internes qui les rendent particulièrement fragiles. Elles sont très sensibles aux chocs qui peuvent soit faire filer la fêlure, soit provoquer le bris de la pierre en plusieurs parties. Un tel accident peut aussi survenir pendant le sertissage quand on pose les griffes.

Un diamant VVS, dépourvu d’inclusions à l’oeil nu.

Les inclusions gazeuses ou liquides

Lorsqu’elles sont invisibles à la loupe 10x, elles ne présentent pas d’inconvénient pour la taille du diamant, sauf en cas de surchauffe, et, comme il est pratiquement impossible de les discerner, elles sont sans importance quant à la valeur de la pierre.

Les inclusions solides

Elles peuvent être cristallisées ou amorphes et on les trouve soit isolées, soit réunies en petits groupes. Elles sont parfois visibles à l’œil nu mais parfois il faut avoir recours à la loupe pour les discerner. On les observe sous forme de « piqués » noirs, blancs ou colorés.

Les inclusions sont d’origine multiple. Souvent, il s’agit de petits diamants sous forme de cristaux parfois octaédriques ou dodécaédriques, ou bien encore de graphite, responsable des fameux piqués noirs.

Les diamants provenant de Kimberley ont tendance à avoir des inclusions de diopside vert contenant du chrome, parfois du grenat. En Afrique du Sud, on peut trouver des inclusions de zircon, soit blanc, soit jaune, parfois brun, fragmenté ou en cristaux, seul ou groupé. Dans ce dernier cas, il provoque comme un givre autour de l’inclusion et il est très visible au polariscope où il se présente comme un arc-en-ciel. En raison du coefficient de dilatation du zircon, plus élevé que celui du diamant, le sciage ou la taille des pierres contenant de telles inclusions doit être mené avec précaution, car les pierres atteignent des températures élevées qui provoquent la dilatation des inclusions avec, comme résultat final, l’apparition d’une déchirure ou l’éclatement total de la pierre. Dans les diamants provenant du Brésil, on trouve parfois des inclusions de quartz.

Un diamant SI2 contenant des inclusions solides

Les inclusions sont habituellement constituées de diamant (sous une autre cristallisation, ce qui le rend invisible) de peridot, grenat pyrope, spinelle ou chromite, enstatite, diopside chromifère, zircon incolore ou brun jaune, quartz, magnétite, hématite, ilmétite, biotite, chlorite, oxyde de fer, pyroxène, etc. En dehors des inclusions, on découvre parfois dans les crevasses du diamant de l’or, du quartz ou du diamant différemment cristallisé.

Il s’agit, en général, de cristaux monominéraux non altérés, pré ou syngénétiques. L’utilisation du microscope électronique permet aujourd’hui des découvertes de plus en plus intéressantes dans le domaine des inclusions, concernant l’origine du diamant.

→ C’est à cause des inclusions parfois invisibles à l’oeil nu qu’une expertise est nécessaire, pour déterminer le degré de pureté de votre diamant

De très grands progrès sont faits dans leur étude, qu’elle concerne les inclusions dans le diamant ou dans les autres pierres précieuses. À cet égard, il faut citer les noms de M. L. Dele-Dubois, P. Dhame-lincourt et H.-J. Schubnel dont nous extrayons les lignes suivantes d’un de leurs articles parus dans la Revue de Gemmologie A.F.G., intitulé « Étude par spectroscopie Raman d’inclusions dans les diamants, saphirs et émeraudes ». Cette étude fait suite à notre publication « La microsonde moléculaire à laser et son application à la minéralogie et gemmologie », parue dans le numéro 52 (sept. 1977) de la même Revue.

Nous y avons alors montré les possibilités d’application à la muséologie, l’expertise des gemmes et l’analyse des inclusions fluides in situ dans les cristaux. Cette seconde publication montre que les divers perfectionnements que nous avons pu apporter à cette méthode ont permis dans certains cas, d’obtenir des spectres exploitables malgré la fluorescence des matrices ou l’opacité des corps à analyser. La fluorescence bien connue des diamants n’est plus un obstacle pour l’obtention des spectres de ses inclusions et, en ce qui concerne les minéraux opaques, les spectres que nous avons obtenus pour la pyrite montrent que les limites d’investigation de l’appareil ne sont pas encore atteintes. Le présent travail est une étude des inclusions solides de quelques diamants d’Afrique du Sud et des saphirs d’un nouveau gîte de Colombie, ainsi que l’étude des solides et fluides contenus dans une émeraude de Colombie. Nous confirmons ainsi que la microsonde à effet Raman est un outil particulièrement bien adapté aux études des matières précieuses que sont les gemmes. Dans la microsonde moléculaire à laser « M.O.L.E. », un faisceau de photons généré par un laser est utilisé pour exciter l’échantillon et la lumière diffusée par effet Raman (diffusion avec changement de longueur d’onde) sert pour identifier et localiser les différents constituants polyatomiques présents dans l’échantillon à partir de leur spectre de vibrations moléculaires.

Inclusions identifiées dans le diamant d’après Mayer
Inclusions identifiées dans le diamant d’après Mayer

La résolution spatiale est celle d’un microscope optique ; une trop grande opacité de l’inclusion peut rendre toute observation impossible, car il est nécessaire que le faisceau de photons pénètre la matière pour pouvoir obtenir son spectre de vibrations moléculaires.

Les phases incluses sont identifiées in situ directement au travers d’une face cristalline ou d’une facette d’une pierre taillée. D’autres méthodes sont peu utilisées en raison de leur caractère destructif. Ici, les opérations d’identification et d’authentification sont réalisées simultanément par enregistrement du spectre de la gemme matrice (détermination de l’espèce minéralogique) et de ceux de ses inclusions (différenciation des pierres synthétiques, localité d’origine, type de gisement).

Nous avons déjà étudié de nombreuses inclusions. La taille des inclusions varie de quelques microns à 300 microns environ. La radiation excitatrice utilisée a été choisie selon l’inclusion afin d’exciter le moins possible le phénomène de fluorescence, toujours gênant lors de l’enregistrement d’un spectre Raman. De plus, la technique a été améliorée par l’adjonction d’un diaphragme à iris conjugué au plan objet de l’objectif du microscope qui permet d’éliminer tout rayonnement ne provenant pas du volume où est focalisé le faisceau laser qui permet de contrôler la résolution axiale de l’instrument.

Inclusions dans les diamants d’Afrique du Sud

Les pierres étudiées étaient taillées en brillant, en triangle à degré ou étaient simplement des lamelles de clivage polies ou brutes. Nous n’avons pas fait figurer sur les différents enregistrements le spectre de la matrice car le diamant n’ayant qu’une seule raie très intense à 1 332 cm–1, celle-ci ne nous gêne pas pour la plupart des composés minéraux.

The Big Hole, ou mine de Kimberley en Afrique du Sud
The Big Hole, ou mine de Kimberley en Afrique du Sud
Photo : Bjørn Christian Tørrissen http://bjornfree.com/

Inclusion de spinelle (Chromite) dans une lamelle de clivage

Les valeurs des fréquences des raies observées à 690, 650, 600 et 560 cm–1 sont caractéristiques de la structure spinelle de la chromite. Nous faisons ici référence aux spectres obtenus au laboratoire par J. Barbillat. Le glissement de quelques cm– 1 pour la fréquence de la raie la plus intense, 690 cm– 1 lors du déplacement du point de focalisation du faisceau laser d’une extrémité à l’autre de l’inclusion, montre qu’il y a variation de la concentration en chrome.

Inclusion de fostérite dans un diamant taillé

Inclusion de péridot (fostérite) dans un diamant taillé

Les fréquences observées sont à :

Image des fréquences observées

Les attributions ont déjà été faites. Ce spectre a été obtenu avec un instrument installé à l’Inserm de Lille, spécialement conçu pour travailler avec la raie rouge 647,1 nm. En effet, l’excitation dans le rouge permet, dans certains cas, de limiter fortement le phénomène de fluorescence.

Inclusion de pyroxène (diopside) dans un diamant taillé

Le spectre nous a donné des raies à :

Image des raies obtenues
Image des raies obtenues

L’observation d’une bande large vers 390 cm – 1 provient certainement du fait que l’inclusion est mal cristallisée.

Inclusion de diopside
Inclusion de diopside

Inclusion d’hématite dans un diamant brut

Nous avons obtenu un spectre assez bien résolu avec des raies à :

Images des raies pour de l'hématite
Images des raies pour de l’hématite

En focalisant en un autre point de l’inclusion (partie sombre), on obtient uniquement une bande large à 660 cm – 1 avec un épaulement à 610 cm –1 caractéristique de FeO ou Fe3O4.

Inclusion de graphite dans un diamant brut

Nous n’obtenons qu’une seule raie à 1 580 cm – 1 caractéristique du graphite. La raie à 1 360 cm – 1, qui serait caractéristique d’une forme désordonnée du graphite, si elle existe, est masquée par la raie très intense, à 1 332 cm – 1, du diamant.

Inclusion de grenat (pyrope) dans une lamelle de clivage

En plus des raies du composé, nous observons la raie du diamant plus faible ici car l’inclusion est plus près de la surface.

  • 1035 
  • 918 v1 élongation symétrique Si — O
  • 855 v3 élongation antisymétrique Si — O
Image des raies pour le grenat
Image des raies pour le grenat

Traitement des inclusions

Le clivage, le sciage, le débrutage et la taille permettent d’éliminer nombre d’inclusions. Si ces moyens n’ont pas été suffisants, il reste encore la possibilité de supprimer celles qui sont en contact avec la surface de la pierre par une fissure en faisant bouillir sous pression les diamants dans de l’acide (deep boiling).

Le rayon laser a permis d’atteindre, par forage, les inclusions auparavant inaccessibles, situées au cœur de la pierre. Le rayon laser est un faisceau de lumière cohérente résultant de la stimulation d’une émission de radiations. Ce faisceau lumineux est d’une extrême finesse et ses rayons sont porteurs d’une très grande énergie. C’est en mettant à profit ces propriétés qu’on a pu forer des canaux microscopiques dans le diamant. Un tel forage nécessite une mise au point et un réglage parfait de l’appareil émetteur afin de déterminer avec précision la profondeur de l’inclusion et l’angle d’attaque du rayon. On peut estimer que pour une pierre d’un carat, cette mise au point pouvait durer un peu plus d’une demi-heure alors que le forage lui-même ne prend que quelques minutes.

Les fins canaux résultant du forage au laser permettent de « brûler » l’inclusion à l’acide fluorhydrique. La tache supérieure n’a pas encore été traitée
Les fins canaux résultant du forage au laser permettent de « brûler » l’inclusion à l’acide fluorhydrique. La tache supérieure n’a pas encore été traitée
Un forage au laser dans un diamant
Un forage au laser dans un diamant

Certaines pierres sont presque nettoyées de leurs inclusions après forage au laser. Les autres, plus nombreuses, doivent subir un complément de traitement sous pression, souvent à l’acide fluorhydrique (deep boiling). Il est toujours possible de « brûler » un piqué noir, rouge ou brun et de le « blanchir », ce qui ne veut pas toujours dire l’éliminer complètement.

Le fin canal résultant du forage au laser, d’un diamètre de l’ordre de 5 microns, est rendu presque invisible par l’injection d’une matière ayant presque le même indice de réfraction que le diamant(Procédé Koss, Yehuda ou Goldman-Oved). Soit l’ouverture à la surface est fermée, soit elle reste ouverte. Il est possible de déceler le forage à la loupe de grossissement x10 en raison de la trace continue qu’il laisse à l’intérieur de la pierre.

Les marchandises petites ou bon marché sont forées industriellement, tandis que les pierres plus importantes ou de meilleure qualité font l’objet d’examens et de soins plus approfondis. La technique du forage au laser permet de récupérer certaines pierres invendables, comme celles qui possèdent un gros piqué noir, en leur donnant l’apparence d’être « pures à l’œil nu » (eye clean).

Lors du forage au laser suivi d’un remplissage, des bulles de gaz peuvent apparaître dans le diamant brut, suite à un réchauffement excessif de la pierre sur le moulin de taille. La dilatation peut mener à « l’explosion » de la pierre. Celle-ci se casse en plusieurs parties ou de fines fêlures sous forme d’étoiles apparaissent dans les lignes de clivage. La pierre perd ainsi toute sa valeur.

Forage au laser en forme de ver

Un nouveau système de forage au laser pour éliminer des inclusions a été mis au point (depuis 2000). À l’encontre de l’ancien système qui fore de l’extérieur vers l’inclusion à l’intérieur de la pierre en laissant un canal rectiligne, on part à partir de l’inclusion vers la surface en se brûlant un chemin en zigzagant, donnant l’impression d’une inclusion blanche filiforme. Le nom de « wormholes », trous de ver, était bien approprié. Ce traitement est spécifique pour des inclusions noires qui sont déjà entourées de fractures ou à des inclusions situées près de la surface.

Dans les deux cas, les piqués noirs sont brûlés ou désintégrés et deviennent des inclusions blanches. Selon certaines sources, les inclusions seraient brûlées à l’ultrason, car on observe des petites déchirures à la surface.

Forage au laser en forme de ver
Forage au laser en forme de ver
Autre forage au laser en forme de ver
Autre forage au laser en forme de ver

On focalise un ou plusieurs lasers sur une inclusion à l’intérieur de la pierre, le laser traverse le diamant sans l’abîmer car il est transparent, à partir du piqué noir on crée des fractures qui vont se succéder et finalement briser la surface.

Depuis, le système s’est amélioré, les lignes sont devenues plus fines et donc moins visibles à l’œil nu. Le matériau de remplissage est un verre à base de plomb et de bismuth au lieu de plomb et de brome, ce qui le rend plus résistant. L’effet flash reste toujours présent et on peut voir des petits résidus noirs dans les zones percées suite à la graphitisation (voir remplissage des glets).

Laser

Le terme laser est d’origine anglaise, et est une abréviation de light amplification by stimulated emission of radiation. C’est Albert Einstein qui a posé le principe du laser dans un article publié en 1917 ; le premier laser date de 1960. Depuis lors, le laser connaît un développement important dans de nombreux domaines de fabrication et d’application. Il est utilisé dans les domaines suivants: la spectroscopie de haute résolution, la cinétique de réaction, pour réactions rapides (± 1012 s), la détermination précise de distance, l’holographie, les télécommunications, le traitement du diamant, etc. Comme démontré par la suite, le laser produit des faisceaux lumineux de haute cohésion à l’énergie exceptionnellement forte, la largeur (de bande) de tels faisceaux monochromatiques peut être inférieure à 0,01 mm.

Mise en place de principe d’une unité de laser
Mise en place de principe d’une unité de laser
Représentation d’une émission stimulée dont le résultat est une onde lumineuse cohérente
Représentation d’une émission stimulée dont le résultat est une onde lumineuse cohérente

Lorsqu’un atome est excité, un électron de niveau énergétique (d’énergie) inférieur E1 passera à un niveau énergétique (d’énergie) supérieur E2. Lors d’émission spontanée, l’électron retombe immédiatement dans le niveau inférieur lors d’émission d’une onde lumineuse de fréquence v, pour lequel :

v = (E2 – E1) / h

Le sens de la quantité de lumière émise (ou photon) diffère d’électron en électron en situation active. Ceci rend la lumière émise incohérente. Cette émission est appelée émission spontanée.

Pour certaines variétés d’atomes et de molécules, le niveau énergétique (d’énergie) supérieur est métastable et l’émission ne se fait pas spontanément. Lorsqu’un tel atome activé est irradié par un rayon dont la fréquence v est identique à celle de la lumière émise, une onde lumineuse de la même fréquence en phase est émise. L’onde lumineuse pénétrante est renforcée par l’onde émise, ce qui provoque une lumière cohérente. Cette forme d’émission est appelée émission stimulée, elle est représentée par l’illustration ci-présente.

L’émission stimulée s’accompagne la plupart du temps d’absorption. L’onde lumineuse cohérente peut perdre de l’énergie lors de l’excitation des atomes. Ce processus est représenté de façon schématique par l’illustration ci-présente.

Lors de l’utilisation du laser, le processus d’émission stimulée est appliqué. Pour obtenir du laser une source lumineuse monochromatique cohérente de puissance suffisante, le nombre de photons, formés par émission, doit être supérieur au nombre de photons perdus lors de l’absorption. 

Ceci n’est possible que lorsque la population de l’état excité est plus importante que celle en état énergétique inférieur. D’après le milieu dans lequel l’émission stimulée a lieu, on distingue :

  • Les lasers au cristal stable, comme par exemple le rubis et l’arsénure de gallium;
  • Les lasers qui contiennent une solution de colorant organique ;
  • Les lasers qui contiennent un gaz ou un mélange gazeux, comme le C02, Ar, Ne-Ar.
Représentation de l’absorption par l’excitation des atomes
Représentation de l’absorption par l’excitation des atomes

Prenons, en illustration, un laser avec un cristal de rubis comme milieu. Le cristal de rubis se compose en soi de Al2O3, dopé aux atomes de Cr. Une mise en place schématique d’une unité de laser est représentée par l’illustration p. 133.

Lors de la décharge du flash L, une grande partie des atomes Cr du cristal est excitée. Ce procédé est appelé le « gonflage » du matériel de laser. Dès qu’un atome de Cr excité (activé) retombe dans son état d’origine, une onde lumineuse de fréquence v est émise. Cette onde imposera à son tour une émission stimulée aux autres atomes excités (activés). Il en résulte un rayon lumineux monochromatique, renforcé et cohérent.

Cette émission peut être interprétée comme étant une sorte de résonance à échelle atomique : l’onde renforcée provoquera à son tour une émission stimulée et la nouvelle onde lumineuse est renforcée, etc.

Deux miroirs sont montés des deux côtés du cristal de rubis. Ils reflètent plusieurs fois l’onde lumineuse. Ceci stimule un maximum d’atomes, et fait monter l’intensité en va-et-vient.

Afin que ces ondes de va-et-vient restent en phase, il est indispensable que la distance entre les deux miroirs comprenne exactement un nombre de fois la longueur d’ondes d’émission.

Dans la pratique, le miroir de gauche (qui reflète 99 % de la lumière pénétrante) et le miroir de droite (qui en reflète 90 %) permet à l’onde de se renforcer de façon continue lors de son mouvement aller-retour. Une onde lumineuse cohérente et continue traverse enfin le miroir de droite (qui laisse passer 10 % de la lumière). Dans un laser à rubis, ce phénomène a lieu après chaque décharge du flash L. Toute décharge libère une impulsion du laser de 10 – 3 secondes, dépendant du type de laser. Lors d’un rythme élevé de décharges, le laser doit être refroidi intensivement. Lors du « gonflage » continu du laser, un rayon laser de ± 2 watts est obtenu, ceci dépendant du type de laser employé. Lors de l’utilisation d’un laser à verre, l’excitation est continue. Seule une partie de l’énergie est utilisée pour exciter les atomes de gaz. L’excitation a lieu via un système d’électrodes intégré dans le milieu même du laser. La dénomination de laser continu du laser à rubis, à pulsation et au gaz, est basée sur son fonctionnement.

Le rayon laser et le diamant

Le rayon laser est devenu un instrument indispensable dans la taille du diamant.

Le rayon laser a connu lui aussi une évolution importante depuis son emploi dans le secteur du diamant. Les premières utilisations étaient le forage dans des diamants taillés. Il s’agissait d’un forage en profondeur jusqu’à la tache noire ou le piqué qui dépréciait la pierre. Le canal ainsi foré servait au nettoyage à l’acide des taches de carbone. Actuellement le rayon laser est employé pour le sciage automatique de plusieurs pierres à la fois, l’entaille du clivage et la préforme de la pierre. Il est devenu une phase complète et intégrante dans le processus de fabrication.

Les premiers rayons laser étaient au CO2 ; ils furent remplacés par le laser à YAG (Ytrium Aluminate Garnet), dix fois plus petit. Un flash lumineux au travers d’un cristal de YAG le transforme en rayon cohérent et puissant. Le rayon est envoyé au travers de fibres optiques vers l’instrument de taille ou de forage. Suite au large faisceau émis par le flash, on crée une accumulation de chaleur dans les cristaux du laser, ce qui entraîne une diminution de capacité. C’est une raison pour laquelle les constructeurs ont élaboré des unités en plusieurs éléments de 500 W en série, pouvant ainsi atteindre les 2 à 3 kW avec refroidissement à eau. Le problème du laser n’est plus dû à sa capacité de développement de puissance mais plutôt à la capacité de sa transmission par fibre optique.

Après le laser rouge est venu le laser vert, encore plus performant.

Le spectre électromagnétique
wavelength = longueur d’ondes
Le spectre électromagnétique
wavelength = longueur d’ondes

La spectroscopie raman en gemmologie

L’effet Raman est un phénomène découvert en 1928 par le physicien indien du même nom, qui constata le changement de longueur d’onde d’un rayonnement par diffusion dans un solide, un liquide ou un gaz. Il obtint même le Prix Nobel de physique en 1930.

Cette technique emploie l’effet secondaire de la diffusion de la lumière dans les milieux transparents, comme par exemple les pierres précieuses.

Un solide transparent, éclairé en lumière monochromatique de fréquence définie émet, outre la radiation excitatrice, deux ensembles de radiations de fréquences déterminées respectivement plus grandes et plus petites. Les différences de fréquences entre ces différentes raies sont indépendantes de la radiation excitatrice, indépendantes de la température et caractéristiques de l’objet étudié. Le spectre Raman ainsi créé dépend de la nature des atomes qui constituent la molécule (par exemple une inclusion typique d’une pierre précieuse), de leur agencement et de la nature des liaisons entre atomes. Cette étude fournit ainsi des renseignements précieux concernant la structure des molécules.

L’obtention des spectres Raman nécessite l’emploi d’un spectroscope électronique très dispersif. L’emploi du rayon laser a permis d’augmenter la performance de l’effet.

L’effet Raman est donc observé lorsque le rayon laser illumine l’inclusion dans la pierre précieuse. Une très faible proportion de la lumière diffusée est alors décalée en fréquence alors que les atomes consistant en la matière observée vibrent. L’analyse de cette lumière diffusée révèle un ensemble de raies caractéristiques de la composition de l’inclusion examinée, soit le spectre Raman. Ce spectre de lumière renseigne sur la composition chimique ainsi que sur la structure du matériau. Couplée à un microscope optique, cette technique permet de viser et d’identifier des particules ou des inclusions aussi fines que 1 micron (5 microns, cela représente la grandeur de la section d’un cheveu).

Dans la microsonde moléculaire à laser, le faisceau de photons est généré par le rayon laser et est utilisé pour exciter l’inclusion de la pierre précieuse. La lumière diffusée par l’effet Raman servira à identifier les différents constituants polyatomiques présents dans l’inclusion et ce à partir de leurs spectres de vibrations moléculaires typiques.

Placement d’une pierre dans le spectroscope Raman de la firme Renishaw
Placement d’une pierre dans le spectroscope Raman de la firme Renishaw
Le Dr Ellen Biermans sur l’appareil Renishaw de la firme Raman au HRD d’Anvers
Le Dr Ellen Biermans sur l’appareil Renishaw de la firme Raman au HRD d’Anvers

Comme nous l’avons vu, l’effet Raman fut appliqué pour la première fois en 1977 par l’équipe de H.J. Schubnel, P. Dhamelindourt et Madame M.L. Dele-Dubois.

Depuis, le principe est employé par tous les grands laboratoires de gemmologie, il est devenu un outil indispensable face aux nouvelles synthèses des pierres précieuses.

Le diamant qui a longtemps été épargné des manipulations et synthèses se trouve actuellement confronté au même phénomène que les rubis, émeraudes et saphirs. Les techniques de H.P.H.T. (haute pression, haute température) font frémir les diamantaires.

Ajoutons le phénomène (espérons passager) des diamants de « conflits » où l’origine pourrait être déterminée grâce au principe Raman. Ce qui pourrait balayer définitivement cette saga hors de notre secteur. Un certificat d’origine émis par le pays producteur ainsi qu’une prise d’échantillons pour l’analyse par spectroscopie Raman pourraient déterminer l’origine des pierres. L’étude des inclusions dans les diamants bruts confirmerait la véracité des certificats d’origine.

La spectroscopie Raman apparaît maintenant comme un outil indispensable pour l’analyse des minéraux et des gemmes. La technique offre de nombreux avantages pour le gemmologue : non destructive, pas de préparation d’échantillons, rapidité et surtout facilité d’utilisation.

Le spectroscope à effet Raman de laboratoire est constitué d’une ou de plusieurs sources laser, d’un microscope optique, d’un spectromètre pour l’analyse de la lumière et d’une chaîne de détection. Un ordinateur permet le pilotage des divers éléments du système et le traitement des données.

L’interprétation des données spectrales est grandement facilitée grâce à une bibliothèque informatique de référence. Non seulement la nature de la pierre peut être déterminée, mais aussi les manipulations telles que les remplissages des fissures dans les émeraudes ou diamants, ainsi que le type de polymère ou de résine employés. Récemment, la spectroscopie Raman a été utilisée avec succès pour distinguer des diamants issus de nouveaux traitements.

Ce qui était un appareil volumineux (remplissant une chambre, dans la pénombre, d’environ 10 m sur 10) et surtout exorbitant (seulement accessible pour des universités ou des multinationales) est devenu plus compact, et le prix a lui aussi fortement diminué. Il reste malgré tout encore inabordable pour le bijoutier. Les modèles récents ont la grandeur d’une boîte à cigares et le prix en est aussi fortement diminué.

Principe du spectroscope à effet Raman
Principe du spectroscope à effet Raman

L’exemple montré ci-dessous montre le résultat d’une recherche en bibliothèque et l’identification d’un grenat.

Exemple d’aide à l’interprétation. Spectre Raman inconnu (spectre du haut),
et résultat de la recherche dans la bibliothèque « Renishaw Inorganic Materials » (spectre du bas).

La méthode permet également de déterminer la nature des gaz ou des liquides observés dans de très faibles inclusions. L’exemple illustre bien l’intérêt de la méthode pour l’étude des inclusions fluides. La pierre examinée était un coridon de l’Institut de gemmologie de l’H.R.D. Une inclusion a été observée à environ 200 microns sous la surface. L’analyse Raman effectuée au centre de cette inclusion a permis de mettre en évidence la présence de CO2. Le spectre Raman correspondant est reporté sur la figure.

Image en lumière blanche d’une inclusion dans un corindon.
L’analyse Raman a été effectuée au centre de l’inclusion

L’effet Raman est, comme nous l’avons vu, observé lorsqu’un laser illumine un matériau. Une très faible proportion de la lumière diffusée est alors décalée en fréquence alors que les atomes constituant le matériau vibrent. L’analyse de cette lumière diffusée révèle un ensemble de raies, caractéristiques du matériau examiné (spectre Raman). Ce spectre de lumière renseigne sur la composition chimique ainsi que sur la structure du matériau. Couplée à un microscope optique, cette technique permet d’identifier des particules ou impuretés proches du micron.

Spectromètre Raman Confocal Renishaw RM1000
Spectromètre Raman Confocal Renishaw RM1000
Le spectre Raman obtenu au centre de l’inclusion indique la présence de CO2.
Le spectre Raman obtenu au centre de l’inclusion indique la présence de CO2.

L’analyse a été réalisée sur un spectromètre Raman confocal Renishaw RM2000 équipé d’une source laser argon ionisé émettant à 514,5 nm.

Conclusion: les inclusions, défaut ou piques sont des messages de notre genèse, de la création du monde minéral, pour cette raison ne serait-il pas plus juste de parler de « caractéristique » ou de « caprice » de la nature ?

© Dureté 10 – Eddy Vleeschdrager